La descente aux enfers de Trainline Europe se poursuit

Capitaine Train se retourne dans sa tombe.

Presque 10 ans après le rachat en 2016 de Captain Train, ex Capitaine Train (devenu ensuite Trainline Europe) par l’entreprise britannique Trainline, ce qu’il reste de cette application continue à être allégrement détruit par la cupidité des actionnaires de cette dernière, aujourd’hui cotée en bourse.

Trainline avait pourtant déjà habitué les anciens fans de ce service de réservation de billets de train, qui n’hésitaient jamais à en faire l’apologie, à la déception. La disparition de l’application en 2020 avait fait beaucoup parler et la confiance avait disparu, empêchant l’entreprise de capitaliser sur les déboires de son concurrent direct.

En septembre 2025, Trainline connaît un nouveau bas : le service fait désormais la promotion, juste après de l’achat des billets de train, du service payant (à 21 euros par mois !) de cashback Webloyalty, reconnu largement comme étant un dark pattern. Un pop-up s’affiche en effet, promettant en gras « 16,87 € remboursés ».

Cette pratique est légale, mais le député Modem Philippe Latombe souligne qu’elle pourrait « s’apparenter à de l’hameçonnage » et rappelle que l’entreprise Webloyalty a été condamnée en Italie à 800 000 euros d’amende en 2014, l’autorité italienne de la concurrence considérant que 62 % des internautes ayant versé de l’argent à l’entreprise auraient souscrit à l’abonnement sans même s’en rendre compte.

La SNCF, sous le feu des critiques, avait mis fin à cette pratique fin 2023. Capitaine Train promettait de révolutionner l’achat en ligne de billets de train ; il y est parvenu, mais le Capitaine est aujourd’hui bel et bien mort.

La mairie de Paris ne devrait pas promouvoir le délit d’homicide routier sur ses espaces publicitaires

« J’ai décidé de faire la promotion d’une évolution législative douteuse ».

Le lobbying de certaines associations de victimes et de familles de victimes aura payé : la loi du 9 juillet 2025 crée deux délits d’homicide routier et de blessures routières, qui seront constitués en cas d’accident causé par un automobiliste à la suite d’une conduite délibérément à risque.

Cette réforme est éminemment regrettable à de nombreux égards :

Malheureusement, la ville de Paris a choisi de mettre en avant cette évolution juridique, en la présentant comme l’aboutissement du « combat de l’association Antoine Alléno », créée par les parents et le frère de ce jeune homme tué à Paris à l’âge de 24 ans par un voleur de voiture ivre, qui aurait fait « bouger la loi ». Il semble pourtant que la loi se serait bien passée d’être « bougée »…

La Sorbonne s’obstine dans la réforme désastreuse de sa licence de droit

Voilà déjà plusieurs mois que je me retiens d’écrire cet article, en espérant naïvement que le bon sens finisse par triompher et que la direction de l’École de Droit de la Sorbonne (EDS) de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne revienne sur ses erreurs. Malheureusement, cette réforme a été votée et ses modalités d’application viennent d’être publiées en février 2025.

Voici les principales innovations de cette réforme, telles que retracées dans un article publié sur L’Étudiant.fr :

« La maquette de la licence de droit de la Sorbonne de Panthéon-Sorbonne sera réformée en octobre 2025. Les cours seront désormais condensés en deux ans et demi.

Afin de conserver l’ensemble des enseignements et matières du programme actuel, les deux premières années de licence comporteront 14 semaines de cours par semestre, contre 12 actuellement. Le nombre d’examens semestriels sera par ailleurs réduit, au profit d’examens annuels sur les matières fondamentales.

Le dernier semestre de la licence sera ainsi libéré pour permettre aux étudiants « d’enrichir leur formation et de mûrir leur projet ».

L’étudiant pourra choisir entre quatre options : un projet professionnel (stage ou autre activité professionnelle pendant 4 à 6 mois) ; un séjour d’études d’un semestre dans une université étrangère ; un mémoire de recherche juridique accompagné de séminaires ; ou bien un projet personnel alternatif validé par l’université (engagement citoyen, activité bénévole à temps plein ou semestre de formation dans une autre discipline) ».

Soyons clairs : l’objectif poursuivi est louable, et une réforme périodique de la maquette de la licence est nécessaire pour s’adapter aux évolutions du droit. Toutefois, cette réforme suscite de vives inquiétudes à plusieurs aspects.

Tout d’abord, la communication de l’EDS vis-à-vis des étudiants en 1ère année de licence a été déplorable – voire franchement irrespectueuse. Alors que la réforme avait été votée depuis plusieurs mois, la direction a conservé un flou autour de ses modalités d’application précises jusqu’en février 2025. Alors que certains étudiants interrogés expliquent envisager d’abandonner leurs études de droit en conséquence, l’EDS a laissé passer la date de formulation des voeux sur Parcoursup, empêchant ainsi ces étudiants de prévoir une réorientation en connaissance de cause.

Sur le fond, tous les étudiants en droit savent que trouver un stage avant le master relève du miracle, d’autant plus sur 6 mois et en compétition avec une promotion entière de 700 étudiants ; l’EDS rappelle d’ailleurs cyniquement que « la recherche d’un stage reste de la responsabilité première de l’étudiant ». Cette réforme ne fera donc que renforcer la reproduction sociale, déjà très présente dans les études de droit : les étudiants disposant du réseau adapté n’auront pas de difficultés à trouver un stage, tandis que la situation sera bien plus difficile pour le reste de leurs camarades.

Il en est de même pour les stages à l’étranger, la sélection pour un échange au 6ème semestre de licence étant déjà rude avant l’entrée en vigueur de la réforme. Les capacités d’accueil ne suivront pas, comme le reconnaît à demi-mot l’EDS1.

En pratique, la grande majorité des étudiants se tourneront donc vers le « projet de recherche juridique », composé de la rédaction d’un « mémoire »2 et de séminaires de recherche et d’approfondissement de leurs acquis. L’objectif de ce mémoire est « d’aborder, grâce à une réflexion personnelle, une question de droit débattue en doctrine ou d’actualité juridique et d’approfondir des notions juridiques, des jurisprudences, des évolutions du droit… » avec l’appui d’un « directeur de recherche ».

Je suis convaincu que deux ans et demi d’études ne suffisent pas à atteindre le niveau de connaissances et d’abstraction nécessaires pour rédiger un mémoire de bonne qualité qui soit utile ou innovant. De plus, en raison du nombre d’étudiants concernés, il y a fort à parier que l’accompagnement du « directeur de recherche » se révèle limité voire inexistant s’il s’agit de professeurs. La situation ne sera guère meilleure si l’université décide de donner ce rôle à des chargés de TD, qui n’auront pas non plus le temps d’accompagner une vingtaine d’étudiants dans ce travail exigeant de recherche.

Enfin, l’annualisation des matières fondamentales des 2 premières années de licence (droit constitutionnel, privé, administratif, de la famille et des obligations), c’est-à-dire la suppression des partiels de janvier au profit du contrôle continu et d’un partiel unique en mai, est profondément préoccupante. La charge de travail conséquente qui pèsera en conséquence sur les étudiants lors des partiels de fin d’année ne mènera à rien de bon, et je suis prêt à parier que cela aura un effet négatif sur le niveau des étudiants (et, in fine, du diplôme…).

La force des études dans une université exigeante telle que la Sorbonne réside notamment dans les partiels. Là où l’évaluation en contrôle continu repose largement sur l’appréciation personnelle du chargé de TD (j’ai déjà constaté des différences de notes allant du simple au double entre des groupes de TD autrement identiques), les partiels offrent à tous la chance de valider leurs acquis dans des conditions relativement égales et nous rapprochent d’un idéal de méritocratie3 . Cette réforme abandonne ces acquis, au profit de plus de sélection et de compétition entre les étudiants.

Étant moi-même un étudiant en droit qui a récemment acquis ma licence de droit à l’EDS, j’espère sincèrement me tromper en écrivant ces mots. J’espère que cette réforme élèvera les étudiants de cette belle université et leur sera bénéfique. Mais, honnêtement, ça semble mal parti.

  1. La communication de la direction se veut rassurante, expliquant que « Les possibilités de mobilité sont vastes sur tous les continents. Toutefois, lorsque la mobilité s’inscrit dans le cadre d’un partenariat, le nombre d’étudiant(e)s susceptibles d’être accueilli est défini par chaque convention de partenariat et varie d’une université à l’autre. Une commission de répartition gérera au mieux l’ensemble des demandes. » ↩︎
  2. La direction de l’EDS elle-même place ces guillemets dans sa présentation, c’est dire à quel point elle y croit ! ↩︎
  3. Si tant est qu’il soit souhaitable de poursuivre un tel idéal, mais c’est un autre débat, qui mérite mieux qu’une note de bas de page. ↩︎

Disparition d’Isabelle Pingel, professeure de droit européen à la Sorbonne

L’École de Droit de la Sorbonne a annoncé à ses étudiants le décès soudain de la professeure Isabelle Pingel le mercredi 11 décembre 2024.

Celle-ci enseignait depuis 2004 à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne le droit institutionnel et contentieux de l’Union européenne, après avoir passé l’agrégation de droit public en 1994. Connue pour sa générosité et son énergie, elle était respectée et appréciée par ses collègues comme par ses étudiants. Elle dirigeait également le Master 2 Droit de l’agriculture et des filières agroalimentaires, qu’elle avait créé il y a 20 ans.

Crédit : Isabelle Pingel (profil LinkedIn).

Dans une publication sur LinkedIn, son collègue Jean-Christophe Barbato écrit :

Chères Collègues, chers Collègues,

C’est avec une immense tristesse que je vous informe du décès soudain de notre Collègue la Professeure Isabelle Pingel.

Isabelle était une Collègue d’une grande culture, particulièrement brillante, joyeuse, toujours pleine d’esprit et extrêmement attentive aux autres.

Éminente européaniste, chercheuse talentueuse et d’une formidable curiosité intellectuelle, elle écrivait avec une élégance et une précision rare. Une part importante de ses recherches étaient consacrée aux questions de diversité linguistique. Ses travaux portaient également sur le droit général de l’Union européenne, le contentieux et le droit international public.

Charismatique et sincèrement dévouée à ses étudiantes et ses étudiants, l’enseignement revêtait pour elle une importance fondamentale.

La connaitre était une chance et sa disparition brutale nous laisse abasourdis et emplis de peine.

Un hommage profond et durable lui sera rendu par Paris 1. Nous ne savons pas encore précisement sous quelle forme mais je ne manquerai pas de revenir vers vous afin que celles et ceux qui le souhaitent puissent y assister ou y participer.

Bien amicalement mais aussi très tristement,

Pour l’AFEE, Jean-Christophe Barbato.

La professeure Pingel était l’une de mes professeures préférées depuis le début de mes études. J’adresse mes sincères condoléances à sa famille et à ses proches.

La merdification de BeReal est en marche

Ça me fait mal de l’admettre, mais il faut se rendre à l’évidence : la merdification de BeReal est en marche, et elle avance vite.

Pour rappel, Wikipédia définit la merdification, ou emmerdification (en anglais, enshittification) comme la « dégradation de qualité qui affecte progressivement les plateformes numériques qui opèrent sur un marché biface, par exemple celles qui mobilisent à la fois des utilisateurs et des annonceurs ».

Depuis que la hype de l’été 2022 est retombée, la startup française a toujours eu du mal à trouver de nouvelles manières de faire revenir les utilisateurs sur son application. Cependant, je trouvais que les nouveautés ajoutées, et notamment les Bonus BeReal permettant à ceux ayant posté à l’heure d’avoir 2 BeReal supplémentaires dans la journée, étaient de bon goût et amélioreraient l’expérience utilisateur.

Tout a basculé le mois dernier, quand l’entreprise française Voodoo, spécialisée dans les jeux mobiles de mauvais goût, a annoncé l’acquisition de BeReal pour un montant de 500 millions d’euros.

BeReal vaut-elle 500 millions d’euros ? Probablement pas, mais peu importe : maintenant, Voodoo doit trouver un moyen de rentabiliser cet investissement. Et ils semblent déterminés à le faire comme ils l’ont fait avec tous leurs jeux mobiles : en détruisant l’expérience utilisateur1.

1ère étape : ajouter des publicités. Les publicités ne sont pas forcément rédhibitoires : elles n’ont jamais empêché personne d’utiliser Snapchat ou Instagram. Voodoo a d’ailleurs choisi le même format que cette dernière, avec une publicité tous les trois posts2.

En revanche, Voodoo a cherché à s’assurer que ces publicités soient vues par les utilisateurs, en implémentant deux changements qui ont, selon moi, considérablement dégradé l’expérience utilisateur :

  1. Il était auparavant possible de glisser vers le bas sur l’écran d’accueil de l’application pour afficher une grille de tous les BeReal postés par ses amis. Cela permettait de voir tous les BeReal sans scroller pendant des heures et de « sauter » directement aux BeReal qui nous intéressaient.
    Malheureusement, cette fonctionnalité a récemment été retirée. Désormais, plus le choix : pour voir les BeReal postés à l’heure, il faut scroller jusque tout en bas (et voir plein de publicités au passage).
  2. Depuis l’introduction des Bonus BeReal, les différents BeReal postés par un même ami la même journée étaient réunis sur une même case.
    Depuis une mise à jour récente, les différents BeReal d’une même personne sont répartis aux quatre coins du fil, ce qui nous oblige à scroller.
    Il faut de plus combiner cette dégradation avec le fait que Voodoo a augmenté le nombre de BeReal possibles dans une même journée à 6 (!!!).

Enfin, la cerise sur le gâteau : la régie publicitaire de Voodoo s’est surpassée pour proposer aux utilisateurs les pires publicités que l’internet a à proposer. Voici un exemple qui a immédiatement fait perdre à mes yeux toute crédibilité à l’application :

Je reste conquis par le concept de BeReal, mais son exécution n’est plus à la hauteur de mes attentes. Au vu de la vitesse à laquelle les nouveaux propriétaires dégradent le service, ses fans ont de quoi s’inquiéter. Quel dommage !

  1. Voodoo préfère parler « d’amener BeReal plus loin en termes de monétisation et de produit ». Quelle avancée ! ↩︎
  2. J’en profite pour partager un conseil (qui pourrait bientôt être obsolète) : il reste possible d’éviter les publicités en appuyant sur « Refuser » lorsque la popup Permets à BeReal de suivre ton activité apparaît. ↩︎

La disparition silencieuse d’un pont du 15e siècle

J’ai récemment eu la chance de passer quelques jours de vacances dans le magnifique village de Calacuccia, au pied du Monte Cinto (plus haute montagne de Corse !). En lisant une présentation de la commune sur internet, un point a attiré mon attention :

Le pont génois de Fontanella du XVe siècle, est situé sur le Golo, sous le barrage de Calacuccia. C’est un pont à cinq arches, une grosse et quatre petites. Il a été en partie détérioré lors de la crue de 1994. Le pont a été entièrement emporté lors de la tempête Fabien de décembre 2019.

L’absence de sources et de détails supplémentaires m’a immédiatement frappé. Un pont génois1 du 15e siècle se serait effondré dans un quasi anonymat ?

Le pont de Fontanella, photographié par Pierre Bona — Travail personnel, CC BY-SA 3.0. Pour une vue rapprochée, voir cette photo.

Au terme de recherches plus longues que je ne l’aurais imaginées, j’ai fini par trouver un article d’un journal local portant sur l’effondrement de ce pont. À ma connaissance, cet article de Corse-Matin est le seul article de presse portant sur cet événement. Je n’ai trouvé aucun article Facebook ni aucun tweet et la commune n’a même pas de site internet.

Le pont génois de Funtanella photographié par un satellite le 6 juillet 2017 (via Google Earth).
La même vue, montrant le pont effondré, le 10 juillet 2020 (via Google Earth).

L’affaire est allée un peu plus loin grâce aux députés du parti autonomiste Femu a Corsica à l’assemblée de Corse, qui ont déposé en 2020 une motion demandant à EDF (exploitant du barrage en amont) la fourniture d’une note explicative retraçant l’historique des différentes manœuvres de vannes effectuées lors de la crue des 21 et 22 décembre 2019. La motion demande également à EDF de « rechercher, en concertation avec la Collectivité de Corse, les voies et les moyens permettant de financer la reconstruction du pont de la Funtanella ».

Cependant, EDF a vite répondu que la ruine du pont en aval du barrage de Calacuccia ne peut pas lui être imputée et qu’elle ne pourrait par conséquent pas financer d’éventuels travaux de reconstruction. Depuis, l’affaire semble au point mort et tout le monde semble avoir oublié le pont génois de Funtanella.

Je trouve tout à fait dingue qu’un monument de 600 ans, emblématique de la culture de sa région, puisse disparaître ainsi dans le plus grand des silences. C’est malheureusement courant dans un pays avec une histoire aussi riche, mais c’est un peu déprimant…

  1. Les corses me reprocheront de ne pas préciser que ce pont a en réalité été bâti par des corses, pendant la période génoise. ↩︎

Le comportement anticoncurrentiel de Google prend de nouvelles proportions

Voilà une actualité qui m’énerve énormément : Reddit a récemment modifié son fichier robots.txt pour interdire à tous les moteurs de recherche d’indexer son site internet.

Toutefois, Google (qui détient déjà la grande majorité du marché !) a conclu en février 2024 un contrat d’une valeur de 60 millions de dollars par an avec Reddit pour pouvoir accéder en direct aux contenus postés sur le site et les utiliser pour entraîner ses modèles d’intelligence artificielle.

Le problème, c’est qu’en raison de l’état de plus en plus désastreux des moteurs de recherche ces dernières années, il est désormais bien connu que limiter ses recherches à Reddit (en y ajoutant « site:reddit.com ») est devenu l’un des seuls moyens d’obtenir des résultats pertinents, sincères et rédigés par des humains.

En écartant ainsi la compétition de cette mine d’échanges et d’information jusqu’ici consultable librement, Reddit permet à Google d’empêcher l’ensemble de ses concurrents d’indexer ces contenus, qui sont indispensables pour proposer un moteur de recherche de qualité. Ce faisant, les deux entreprises s’adonnent à un comportement parfaitement anticoncurrentiel. qui leur vaudra, je l’espère, une amende extrêmement salée de la part de l’Union européenne.

La Bibliothèque de la Cité des Sciences bloque l’accès à Sci-Hub

L’excellente bibliothèque de la Cité des Sciences, dans le 19ème arrondissement de Paris, a pris une décision pour le moins étrange : elle bloque désormais, sur son réseau WiFi accessible au public, l’accès aux sites internet qui permettent d’accéder gratuitement aux livres et articles scientifiques. On retrouve notamment parmi les sites bloqués Sci-Hub, Library Genesis, Z-Library ou encore Anna’s Archive.

Le message d’erreur sous forme de coup de pression renvoyé par le système.

Il semblerait s’agir d’un simple blocage DNS, donc facile à contourner (même si le fait que le WiFi demande de se réauthentifier toutes les 15 minutes complique le recours à cette situation…). Il est aussi possible de contourner ce blocage en utilisant un réseau 4G / 5G plutôt que le WiFi, ou encore en utilisant le navigateur Tor.

En revanche, j’ai du mal à comprendre pourquoi la BSI a pris cette décision. Ça n’est pas pour se conformer à des obligations légales ou règlementaires, puisque par exemple rien n’oblige au blocage du site Anna’s Archive, qui n’a fait l’objet d’aucune décision de justice en France.

Ces ressources documentaires sont pourtant particulièrement utiles à tous, d’autant plus puisqu’elles permettent l’accès à des ressources scientifiques qui ne sont pas disponibles à la bibliothèque. Ce zèle au blocage me semble particulièrement regrettable.

L’École de droit de la Sorbonne annule un partiel de L3 pour triche

Le lundi 15 janvier 2024 à 18:00, les étudiants du groupe 2 de la troisième année de licence de droit de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne étaient amenés à passer leur partiel de Relations internationales (Droit international public), mais le déroulement de cette épreuve a été entaché d’importantes irrégularités.

Comme chaque janvier depuis plusieurs années, l’université Paris 1 a choisi d’externaliser les partiels de 3ème année de droit à la Maison des Examens d’Arcueil-Laplace. Les étudiants étaient partagés entre 2 salles d’environ 150 étudiants chacunes.

Problème : cette année, une des deux liasses de sujets a été oubliée par le personnel de l’université au coffre, situé au centre Lourcine à Paris (à plus de 20 minutes de trajet). Les surveillants, qui se présentaient comme travaillant pour la Maison des Examens et non pour l’université, ont commencé à distribuer les sujets puis se sont arrêtés sans reprendre les sujets déjà distribués. Les étudiants ont ensuite été laissés à eux-mêmes avec la moitié des sujets distribués pendant plus de 30 minutes.

La moitié de la salle qui a reçu les sujets a rapidement commencé à en discuter entre elle, sous le regard bienveillant des surveillants (l’un d’entre eux leur a même demandé de « parler moins fort », à l’hilarité générale !). Puisque l’examen prenait la forme d’un QCM, même les étudiants qui ne voulaient pas participer à la conversation ont entendu malgré eux les réponses à la majorité des questions.

Le reste des sujets est ensuite arrivé avec plus de 30 minutes de retard et la décision a été prise de commencer l’épreuve. Toutefois, les étudiants ont reçu 3 jours plus tard l’email suivant :

Chères étudiantes, chers étudiants,
Suite aux irrégularités constatées par le jury lors de l’épreuve de Droit international public sans TD avec Mme Daphné Dreyssé (groupe 2) en date du 15 janvier 2024, le jury de la Licence 3 a décidé d’annuler l’épreuve concernée.

Cette décision n’est pas étonnante, mais elle n’a pas manqué de faire fortement réagir les étudiants concernés, qui avaient pour la plupart déjà fini les partiels et dont certains étaient déjà partis en vacances. La contestation a été si forte que le directeur du département licence de l’EDS, le professeur Nicolas Warembourg, a pris la peine de s’adresser directement aux étudiants en des termes particulièrement catégoriques :

Madame, Monsieur,

Cette question ayant fait l’objet, parmi les étudiants de troisième année de Licence, d’un certain nombre d’interrogations, je reviens à vous pour apporter quelques précisions utiles.

Je vous confirme que par décision du jury compétent a été prononcée souverainement l’annulation de l’épreuve de droit international public (sans T.D.) du lundi 15 janvier à 18h., tenue dans le centre d’examens d’Arcueil, à laquelle vous aviez été convoqués.

En conséquence, par application des dispositions du Règlement des examens adopté par la CFVU le 12 novembre 2020, relatives aux « circonstances exceptionnelles, » une convocation formelle vous a été dressée selon les voies réglementaires afin de repasser l’épreuve annulée.

Pour mémoire :
Règlement des examens – CFVU, 12 novembre 2020
Cliquez sur le lien ci-dessous :
[lien vers le règlement des examens]

Sous réserve du cas d’étudiants en mobilité, cette convocation vous est opposable, elle n’est susceptible de faire l’objet d’aucun aménagement, pour quelque motif que ce soit. Le calendrier des examens a été adopté et publié par les instances de l’université, il nous est à tous opposable.

Je vous rappelle que le département de la Licence en droit organise, pour chaque session d’examens, près de quatre-vingts épreuves en Licence et, pour chacune de ces épreuves, il doit planifier les aménagements personnalisés auxquels ont droit les étudiants en situation de handicap. Le manque de locaux a conduit l’université à planifier certaines épreuves à l’extérieur de Paris intra muros, notamment au centre d’examens d’Arcueil : le département de la Licence met en oeuvre cette décision dictée par les impératifs du service, quand bien même elle alourdit considérablement les contraintes réglementaires et logistiques.

Il n’est sans doute pas normal qu’une liasse de sujets reste au coffre, au centre Lourcine, au lieu d’être transportée à Arcueil, mais nous constatons avec regret qu’en dépit de tout un protocole mis en place pour prévenir ces incidents, l’erreur humaine demeure toujours possible.

Enfin, je me permets d’insister sur un point.

Moins que le temps pris pour imprimer dans l’urgence des sujets manquants, l’annulation d’une épreuve peut être imposée par le comportement des candidats eux-mêmes, en particulier par le non-respect de certaines consignes, comme l’interdiction de communiquer avec les autres candidats. Ces comportements sont susceptibles de compromettre la sincérité d’une épreuve, ils consomment une rupture d’égalité entre les candidats, leur constatation grève d’une irrégularité sérieuse l’épreuve concernée.

Cette mésaventure sera peut-être l’objet d’une utile réflexion sur le respect nécessaire de la discipline collective, sans laquelle aucun service public ne peut fonctionner ni aucun examen se tenir régulièrement. Pour tout étudiant en droit, il doit s’agir d’une évidence.

Je vous souhaite donc bon courage pour vos ultimes révisions et vous adresse des voeux de succès pour cette dernière épreuve.

Nicolas WAREMBOURG
Directeur du département Licence de l’EDS

Même si les dispositions particulièrement claires du règlement des examens a fait rapidement redescendre la contestation étudiante, une telle situation n’aurait pas dû se produire en premier lieu. Ce manqué illustre selon moi le danger que représente l’externalisation des partiels vers des lieux tiers et, plus largement, les conséquences désastreuses du manque de moyens des universités sur les conditions d’étude (et donc indirectement sur la qualité des diplômes…).